Thermae Romae, le manga qui lie Rome antique et Japon contemporain

Therma Romae est un manga conçu par Mari Yamazaki, qui prend pour contexte la Rome antique d’Hadrien. L’histoire suit les tribulations de Lucius Modestius, un ingénieur tourmenté, spécialiste de la création de thermes. Lucius puise son inspiration lors d’incursions aussi extraordinaires qu’éphémères dans le japon contemporain !

L’histoire de Thermae Romae, qui se développe autour du personnage de Lucius, ingénieur de profession, prend place dans la Rome antique. Lorsqu’on le découvre, Lucius est peu reconnu par ses pairs. Mais une baignade dans des bains de la cité va marquer le début de changements profonds pour ce héros perfectionniste, obsédé par son métier.

Péripéties aquatiques

Alors qu’il se détend aux thermes en compagnie d’amis, Lucius, qui passe la tête sous l’eau, est soudainement happé et transporté dans des bains thermaux du Japon moderne. Lucius, qui n’a aucune idée d’où il se trouve, pense un moment s’être égaré dans les bains voisins, réservés à des esclaves. Ce qu’il voit autour de lui le fascine, il y puise des idées qu’il appliquera en se réveillant à Rome, près du bassin où il avait plongé. Aussitôt après avoir repris ses esprits, Lucius se met en tête de reproduire ce qu’il a pu observer au Japon.

Dans les chapitres du 1er tome, l’histoire se renouvelle autour de la même mécanique de faille spatio-temporelle. Lucius est invariablement missionné par une personne pour créer un bain particulier, quasiment sur mesure. En inspectant les lieux et en entrant dans l’eau, Lucius est soudainement projeté au Japon, dans le pays des « visages plats », comme il les appelle. Il émerge tantôt d’une source thermale, tantôt de la salle de bain d’un particulier, ou se retrouve même dans le showroom d’une entreprise vendant des équipements sanitaires.

Lucius, toujours fasciné par ce qu’il découvre dans ses lieux étrangers, crée la surprise ou l’amusement parmi ses interlocuteurs. S’il ne comprend pas leur langue, il parvient parfois à se faire comprendre. Il éveille souvent la curiosité des japonais qu’il rencontre, mais sans les alarmer toutefois : tout occupé qu’il est à examiner les lieux, il ne leur semble jamais menaçant. Il faut dire aussi que ses irruptions donnent lieu à de nombreux quiproquos !

Lors de chacune de ses incursions dans le Japon contemporain, Lucius trouve l’inspiration. Il en revient systématiquement avec une idée, une méthode, qui lui apporte la solution d’un problème auquel il est confronté en début de chapitre. Ses idées novatrices, ingénieuses, vont peu à peu le faire briller auprès de ses congénères romains.

Lucius émerge dans un bain, au beau milieu d’un groupe de japonais médusés.

Lucius prend la lumière

Se révélant de plus en plus créatif et talentueux aux yeux de ses concitoyens, Lucius gagne progressivement en popularité et en notoriété. Il va ainsi jusqu’à faire la rencontre d’Hadrien, empereur régnant mais vieillissant. Lucius va le servir et l’accompagner dans ses déplacements et continuer à employer son talent (dont l’inspiration doit beaucoup aux japonais, vous l’aurez compris), chemin faisant. Au fil de l’histoire, Lucius sera amené à fréquenter et servir plusieurs personnages de la cour impériale.

Bien que les chapitre suivent, comme on l’a vu, un schéma récurrent, la trame globale de Thermae Romae s’esquisse et évolue néanmoins en toile de fond. Lucius, tout occupé à son travail, néglige sa femme qui se détourne de lui. Il échappe, à son insu, à un complot ourdi par des patriciens qui cherchent à se débarrasser de lui… Cette histoire, qui saura captiver les lecteurs appréciant le monde romain, se déroule en 6 tomes parus chez Casterman.

Au cours de son aventure, Lucius éveille l’attention de l’empereur Hadrien, qui le sollicite.

Un humour bien distillé

L’humour de la série tient au fort contraste, au décalage entre Lucius, ingénieur tourmenté, grave et vaniteux, et la modernité avec laquelle il fait face, si familière au lecteur. Ses rencontres avec les japonais, toujours affables et serviables à son contact, donnent place à des moments cocasses.

Frappé dans son orgueil de romain, sûr de la supériorité de son peuple sur les autres, Lucius a bien du mal à comprendre comment leur art du bain peut se montrer aussi raffiné ! Visite après visite, il va progressivement admettre que le mystérieux pays des visages plats s’avère nettement plus avancé que le sien dans ce domaine.

Les scènes du manga au cours desquelles Lucius est propulsé dans le Japon moderne sont toujours empreintes d’humour.

Les bains, trait d’union entre les cultures romaine et japonaise

Comment cette histoire pour le moins originale est-elle venue à Mari Yamazaki, l’auteur du manga ?
A travers de petits textes, qui font respirer l’histoire entre deux chapitres, l’auteur revient longuement sur la passion que les japonais nourrissent pour les bains, et qu’ils partagent en quelque sorte avec les romains de l’antiquité.

On le sait grâce à l’archéologie et aux écrits que nous ont laissé les auteurs et historiens romains, ces derniers passaient énormément de temps aux thermes. De très nombreux complexes thermaux ont en effet été retrouvés dans les villes qui se sont développées et ont connu une activité importante à l’époque romaine. Et les auteurs anciens ont largement contribué également à nous donner un aperçu des bains romains. Juvénal, par exemple, a décrit dans un passage resté célèbre à quoi ressemblait l’ambiance des thermes à Rome.

C’est dans ce trait d’union, dans cette passion commune pour les bains que Mari Yamazaki a trouvé matière à tisser une histoire rapprochant les deux cultures, romaine et japonaise.

Un manga original, à la fois loufoque et sérieux

Thermae Romae, servi par une idée très originale, se lit avec beaucoup de plaisir. On s’attache rapidement à ce fier Lucius, contraint de ravaler sa fierté à intervalles réguliers. L’ingénieur tourmenté se sent toujours coupable de devoir emprunter ses idées à un peuple qui lui fait douter de la suprématie de Rome. Ses escapades dans les bains japonais sont toujours sujettes à des scènes cocasses.

Dans les interludes ménagées par l’auteur, indéniablement passionnée par son sujet, on en apprend beaucoup sur l’usages des thermes par les romains et par les japonais. Les interludes, bien documentés, mais aussi les notes qui émaillent régulièrement l’histoire pour apporter du contexte ou de l’information, montrent d’ailleurs avec quelle rigueur Mari Yamazaki a travaillé sur ces sujets, animée par un réel souci du détail.

Voici un manga qui nous fait voir Rome sous un angle parfaitement original, loin des combats et des conquêtes.