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Pline, le manga qui vous fait voyager dans l’empire de Néron

Pline, de Mari Yamazaki et Tori Miki, aux éditions Casterman
Dernière mise à jour le 27 mars 2025.

Après Thermae Romae, un manga en six tomes paru entre 2008 et 2013, et qui a connu un beau succès, la mangaka Mari Yamazaki publie depuis 2014 un nouveau récit se déroulant lui aussi dans la Rome antique. Cette fois c’est un personnage ayant réellement existé qu’elle a placé au cœur de son histoire : le naturaliste Pline, dont on suit les pérégrinations dans l’Empire.

Lorsque débute Pline, le manga de Mari Yamazaki, le romain est dépeint comme un homme mûr, érudit et respecté par ses pairs. Le personnage est tout à la fois savant et rêveur, curieux de tout, toujours avide de développer ses connaissances en observant la nature tout autour de lui.

Pline parcourt le monde accompagné d’Euclès, un jeune homme grec qu’il a rencontré sur les pentes de l’Etna. Il est entré à son service comme scribe, après qu’une éruption de l’Etna ait détruit sa maison. Euclès note scrupuleusement les propos et commentaires de Pline. Des notes précieuses, soigneusement recopiées et compilées à Rome.

Les deux hommes ont également pour compagnon de voyage Félix, un ancien légionnaire râleur et taciturne, garde du corps, homme à tout faire de Pline.

L’empire du sulfureux Néron pour toile de fond

Quand débute le récit, Pline est rappelé à Rome par Néron. L’empereur, affecté par des troubles mentaux de plus en plus évidents, part progressivement à la dérive. Devenu d’une sensibilité exacerbée, il se préoccupe plus d’art que des affaires et sujets militaires. C’est d’ailleurs pour le gratifier d’un spectacle au cours duquel il se produit, que Néron a requis la présence de Pline.

Quelques intrigues se tissent dans la capitale. Euclès s’éprend d’une jeune prostituée bretonne, qui semble entretenir des liens avec la secte, balbutiante, des chrétiens. La jeune fille, ardemment recherchée et désirée par Néron lors de ses sorties nocturnes, est battue par celui-ci. Mais nos compagnons de voyage jugent bientôt plus sage de reprendre la route et de quitter Rome, pour fuir le tempérament trouble et de plus en plus enclin à la colère de Néron.
Les voici qui traversent la Campanie et la région de Pompéi, où les trois hommes sont témoins en chemin de phénomènes étranges : les pêcheurs d’un village ont attrapé un poulpe géant, les moutons d’un troupeau sont morts sans raison apparente, une source d’eau chaude a jailli au milieu d’une prairie, une lune rouge se lève, des thermes se sont vidés de leurs eaux…

Tout est matière à marquer une pause pour Pline, amoureux de la nature absorbé dans des contemplations successives. Il formule des hypothèses, avec justesse parfois, plus farfelues à d’autres moments. Le surnaturel survient d’ailleurs à intervalles réguliers dans le récit, notamment lorsque nos héros croisent des témoins qui leur signalent avoir vu des créatures fabuleuses.

Un récit tout en errances et parenthèses, à l’image de ses protagonistes

La trame globale de Pline donne parfois l’impression de vagabonder, au rythme des pérégrinations de Pline. On cherche un peu en vain, au fil des tomes, une structure, un schéma qui établirait des attentes, des enjeux. La fin est pourtant connu, puisque Pline disparaîtra dans l’éruption du Vésuve, où débute d’ailleurs le premier tome, dans un flash forward annonciateur qui nous familiarise déjà avec le caractère placide et imperturbable de l’érudit.

Le récit se perd parfois en digressions, se recompose plus loin pour continuer à développer une des nombreuses intrigues de fond.
On se demande si Mari Yamazaki, l’auteure, a réellement une autre ambition que celle de nous promener à travers le monde méditerranéenne, à la suite de cette petite troupe qui évolue, se transforme au fil de ses aventures. Un enfant aussi mystérieux que talentueux rejoint bientôt le dans le groupe, de passage à Carthage, avant de gagner l’Egypte…

Pline, une œuvre très différente de Thermae Romae

Mari Yamazaki, passionné d’antiquité romaine, s’était déjà fait remarquer avec Thermae Romae, un manga plus court, qui jouait davantage la carte de l’humour avec ses voyages spatio-temporels entre Rome antique et Japon contemporain.

Pline est, à de nombreux égards, bien différent de Thermae Romae. S’il y est par moments question de thermes, les points communs s’arrêtent là entre les deux mangas. L’humour n’est pas complètement absent de Pline, et des petits sourires sont distillés ici et là, mais le récit se révèle nettement moins léger que celui de Thermae Romae. Pline recèle de véritables morceaux de noirceur et de violence, même. Cadavres, viols, passages à tabac, rixes sanglantes… le ton est dur et certains personnages font froid dans le dos, à commencer par Néron, aussi tyrannique qu’effrayant.

Une grande fresque dessinée à quatre mains

Pour la partie dessin, Mari Yamazaki a choisi de fonctionner en duo, en s’associant avec un autre mangaka, Tori Miki. Yamazaki se charge de dessiner les personnages, et Miki plante les décors, en se concentrant sur les architectures et paysages. Pour donner vie à ceux-ci, il joue souvent sur des effets de lumière, utilisant tour à tour des contrastes très forts ou des dégradés.

Le duo fonctionne bien puisque de nombreux tomes sont déjà parus (plus de 10 tomes à date, aux éditions Casterman), faisant de Pline une vaste fresque dans laquelle les amateurs d’aventure seront ravis de se plonger. L’histoire étonne quelque peu par ces tours et détours, ses oscillations entre monde scientifique et merveilleux, mais c’est précisément ce côté original et insaisissable qui donne à ce manga, imaginé par une japonaise et se déroulant dans l’antiquité romaine du premier siècle, une touche définitivement exotique !


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