Comment identifier une monnaie romaine : le guide

Lorsque l’on n’a pas une connaissance solide de la numismatique antique, identifier une monnaie romaine n’est pas chose aisée. L’enjeu est pourtant de taille pour comprendre quelle pièce on a sous les yeux, connaître son histoire ou déterminer sa valeur. Voici une méthode qui devrait vous permettre de procéder à l’identification d’une monnaie romaine.

Il peut y avoir différents cas de figures dans lesquels vous souhaiterez, ou aurez besoin d’identifier une monnaie romaine :

• Vous achetez (ou avez acheté) une monnaie ou un lot de monnaies sans que le détail du lot soit précisé
• Vous trouvez une monnaie en détection, avec un détecteur de métaux. Vous pensez qu’il s’agit d’une monnaie romaine, mais ne pouvez pas l’identifier précisément.
• Vous vous apprêtez à mettre en vente une monnaie qui vous appartient et souhaitez l’identifier pour vous faire une idée de sa valeur, ou pour rédiger un descriptif aussi précis que possible.

Dans tous ces cas, et dans bien d’autres, vous chercherez à identifier une monnaie pour en évaluer le prix, ou bien savoir si elle a sa place dans votre collection, où l’y classer, etc.

La méthode pour identifier une monnaie romaine se décompose en plusieurs étapes. Elles fonctionnent comme autant de questions dont les réponses peuvent vous guider vers l’identification, ou au moins vous mettre sur la voie.

Évidemment, il est préférable de cumuler un maximum de réponses à ces questions pour augmenter vos chances d’identifier avec assurance une monnaie romaine. Comme un bon enquêteur, c’est par un faisceau d’éléments concordants, que vous pourrez tirer des conclusions définitives et résoudre une affaire !

Rassurez-vous, obtenir des réponses à toutes ces questions n’est pas toujours nécessaire pour réussir à identifier votre monnaie. Dans certains cas, des réponses mêmes partielles à quelques-unes d’entre elles sont suffisantes pour aboutir à une piste solide. Certaines caractéristiques sont clefs en effet, ou la combinaison de certains critères permet de se prononcer.

Dans tous les cas, ce travail d’identification d’une monnaie revêt toujours un aspect ludique et intéressant.

Identifier le métal d’une monnaie romaine

Pour identifier le métal d’une monnaie, le plus simple est d’observer attentivement sa couleur.

• Monnaie en cuivre. Si elle est en cuivre, une monnaie peut prendre la couleur rouge-orangé caractéristique de ce dernier. Mais le plus souvent, avec le temps, se forme une patine vert de gris. Une monnaie en billon est composée d’un alliage de cuivre et d’argent. Sa couleur peut varier en fonction de la quantité d’argent présente dans la monnaie, allant de l’orangé au gris.
• Monnaie en bronze. Une monnaie de bronze présente elle aussi une couleur orangée. Mais avec le temps ces monnaies ont pris quasi systématiquement une patine verte, mais ces grands modules peuvent aussi être bien plus sombres et tirer vers le noir.
• Monnaie en argent. Les monnaies d’argent prennent des aspects très différents selon l’environnement dans lequel elles ont été conservées. Nettoyées, décapées, elles peuvent être très blanches, même brillantes. Dans leur jus, elles ont un aspect plus sombre, allant du gris au noir.
• Monnaie en or. Les monnaies romaines les plus facilement identifiables sont bien évidemment les monnaies en or. Le métal jaune est brillant, dépourvu de toute oxydation. Il peut toutefois, comme les autres métaux d’ailleurs, porter des marques, des rayures.

Identifier le poids d’une monnaie romaine

L’étape suivante consiste à peser votre monnaie, si vous l’avez en main, et à mesurer son diamètre.

Pour mesurer le poids d’une monnaie, munissez-vous d’une balance aussi précise que possible. Dans bien des cas, il est préférable de disposer d’une balance donnant le poids à une ou deux décimales près. Cette mesure est importante et, autant que possible, vous ne voudrez pas être induit en erreur par une balance approximative. Évitez autant que possible les balances de cuisine, qui manquent souvent de précision.

La mesure du diamètre d’une monnaie ne nécessite quant à elle qu’une règle millimétrée. Une règle d’écolier fait parfaitement l’affaire.

Maintenant que vous savez de quel métal est constitué la monnaie qui vous intéresse, et que vous connaissez son poids et son diamètre, vous pouvez identifier le type monétaire auquel vous avez affaire.

Identifier le type monétaire

Ce triptyque d’information : nature du métal, poids et diamètre de la pièce doit en effet vous permettre de déterminer le type monétaire de la pièce : denier, sesterce, nummus etc…

Au fil de l’histoire romaine, différents types de monnaies se sont succédé et ont coexisté pour constituer un système monétaire, toujours changeant, sur lequel se sont basés les échanges commerciaux.

Référez-vous au tableau ci-dessous pour identifier le type monétaire de votre pièce.

Déchiffrer la légende d’une monnaie romaine

Une fois le type de monnaie identifié, la prochaine étape consiste à s’intéresser à ce qui est écrit et représenté sur la pièce.
Une pièce se compose de deux côtés : un avers et un revers. Sur l’avers se trouve généralement (mais cela ne se vérifie pas systématiquement) un portrait, celui d’un dieu ou d’un empereur. Sur le revers peuvent être représentés des scènes très variables : des individus, des monuments, des biges ou quadriges, des objets de culte religieux… l’iconographie des monnaies romaines est incroyablement riche et variée.

Deux cas de figure ici : soit la monnaie est d’époque républicaine, soit elle est d’époque impériale.

Dans le premier cas, elle contient très peu d’inscriptions, quel que soit sont état. Et ce presque toujours sur le revers, où quelques lettres sont alignées sur un axe horizontal, le plus souvent.

L’inscription visible sur les monnaies républicaines consiste parfois en un simple “Roma”, parfois en un nom correspondant à celui de la famille du monétaire, c’est à dire celui qui a fait frapper la monnaie. Une très grande majorité de ces monnaies républicaines sont ornées d’un portrait de divinité sur leur avers, masculine ou féminine, qui peut être difficile à identifier lorsque l’on est débutant.

Les monnaies impériales (émises à partir d’Auguste) présentent dans une très large majorité des cas un portrait de l’empereur émetteur, entouré de sa titulature. Celle-ci se constitue de l’ensemble des titres honorifiques et des pouvoirs dont l’empereur est investi au moment de la frappe d’une monnaie, et intègre également le nom de l’empereur. La titulature est placée de façon circulaire sur le bord intérieur de la pièce.

Pour faire tenir ces indications sur de si petits modules, les monétaires étaient contraints de recourir à des abréviations. La titulature se compose donc d’une suite de lettres qu’il convient de déchiffrer.
Voici les abréviations que vous retrouverez le plus souvent sur les monnaies romaines :

Essayez d’identifier un maximum de ces abréviations sur la monnaie que vous considérez. Certaines d’entre elles peuvent être suivies de chiffres (romains bien sûr) : TR P, COS.

Une fois ces abréviations identifiées, la séquence formée de lettres qui restent correspond normalement au nom (latin) de l’empereur. Le nom de l’empereur lui-même peut parfois être abrégé.

A présent que vous connaissez le type monétaire et le groupe de lettres qui forment le nom de l’empereur ayant émis la monnaie, une simple recherche sur internet doit vous permettre d’affiner votre identification. En croisant ces informations, vous pouvez formuler des requêtes du type “denier Vespasien”, “sesterce Commodus”. Vous obtenez alors des résultats auxquels vous pourrez comparer votre monnaie.
Si toute la séquence de lettres formant la titulature est lisible sans difficulté, il y a de grandes chances que vous puissiez identifier maintenant votre monnaie.

Dans certains cas en revanche, la titulature est peu lisible : la pièce est abîmée, certaines lettres sont gommées, effacées. Ou bien la titulature se révèle incomplète : la frappe n’est pas centrée et une partie des titres n’est même pas présente sur la monnaie !
Rien n’est perdu pour autant, vous pouvez toujours identifier un empereur en reconnaissant ses traits !

Identifier un empereur par son portrait

Si le déchiffrage de la titulature et du nom de l’empereur s’avère trop délicat, vous pouvez malgré tout reconnaître et identifier l’empereur sur la base de son portrait.

Les numismates chevronnés en sont capables au premier coup d’œil, mais sachez que mémoriser et connaître le visage des empereurs romains nécessite du temps et de la pratique. La tâche n’est pas toujours simple, d’autant que le visage de certains empereurs évolue avec le temps, et que certains sont représentés alors qu’ils sont encore enfants. Certains empereurs partagent un indéniable air de famille (Vespasien et ses fils Titus et Domitien), et d’autres une ressemblance plus fortuite (Pertinax et Septime Sévère, Caracalla jeune et Elagabal).

Notons aussi que plus on avance vers les derniers siècles de l’empire romain d’occident, et plus les artistes en charge de graver les portraits perdent en finesse d’exécution. Les traits des empereurs vont vers toujours plus de simplification, perdent de leur caractère au point de finir par se ressembler tous. Il est de moins en moins facile de les distinguer les uns des autres.

Un bon point de départ pour identifier un empereur consiste à partir d’une planche ou d’une galerie montrant le portrait de tous les empereurs romains que l’empire a compté. De telles planches existent sous la forme de posters qui peuvent s’acheter, ou se consulter en ligne.

Identifier le revers

Les empereurs ont, au fil du temps, utilisé des multitudes de revers différents pour se servir des monnaies à des fins de communication et de propagande, en diffusant des messages.
Parmi les thèmes abordés sur les revers, se retrouvent ainsi notamment :

• une vertu de l’empereur,
• sa capacité à endosser le rôle d’un chef de guerre,
• sa famille, à travers la mise en avant d’un ancêtre divinisé, ou d’un successeur désigné,
• une divinité, qui accorde ses faveurs à l’empereur et le protège,
• le rappel de l’attachement à Rome, personnalisée ou évoquée à travers le symbole de la louve romaine,
• la célébration d’un événement (victoire militaire, construction d’un monument, visite dans une Province…)

Mais les thèmes sont innombrables. Les symboles présentés au revers sont parfois obscurs pour les yeux non initiés des débutants. Si les thèmes sont innombrables, certains sont plus courants que d’autres toutefois.

Essayez, comme pour l’avers, de déchiffrer la légende. Elle est souvent plus courte que la titulature de l’avers, et vous mènera à l’identification de votre monnaie, si vous la combinez aux éléments que vous avez recueillis en amont pour formuler une requête sur les moteurs de recherche.
A défaut, si les lettres ne sont pas lisibles, décrivez du mieux que vous le pouvez ce que vous voyez sur l’avers.

Croiser les informations

Une fois que vous aurez réuni plusieurs éléments parmi tous ceux que nous avons listé, croisez les infos et effectuez une recherche en ligne.

Exemples :
“denier avers antoninus pius aug, revers vict part max”
“sesterce imp maximinus, revers providentia aug”
“denier augustus divi f, taureau chargeant”
“sesterce de néron, revers avec une femme tenant un bouclier, lettres SC”

Les résultats qui vous seront présentés suite à une recherche sur Google Images devraient rapidement vous permettre de confirmer votre identification. Vous validerez au moins une partie de votre analyse.

Rappelez-vous que vous n’avez pas besoin de tenir une réponse ferme et définitive pour chacune des étapes que nous avons listées, mais que celles-ci doivent fonctionner comme des indices qui, combinés, vous orienteront dans la bonne direction. Sachez par ailleurs que, particulièrement dans le cas d’une monnaie que vous trouvez en détection ou dans une brocante, un vide grenier, vous aurez statistiquement affaire le plus souvent à une monnaie relativement courante, bien répertoriée.

Jouer votre carte joker

En dernier recours, un bon livre de numismatique romaine peut toujours vous permettre de retrouver et d’identifier une monnaie. Le livre “Les monnaies romaines”, de Laurent Schmitt et Michel Prieur, facile à trouver sur internet, est sans doute moins encyclopédique que certains gros ouvrages qui font office de références absolues chez les numismates chevronnés, mais suffisamment exhaustif pour que vous puissiez y retrouver votre monnaie. Il présente des milliers de monnaies romaines, frappées depuis la République jusqu’à la chute de l’Empire romain d’occident, issues d’une vaste collection qui a été mise en vente au début des années 2000.

Les moins courageux ou les plus pressés pourront même prendre en photo leur monnaie et la publier sur un forum fréquenté par des numismates. Une âme charitable se fera un plaisir d’identifier la monnaie, pour peu que la demande soit effectuée poliment.

Quadrigatus vous propose d’ailleurs son aide pour identifier votre monnaie.